Exposition "Le prix du Ticket" d'Aline Bouvy - Triangle-Astérides

Exposition "Le prix du Ticket" d'Aline Bouvy - Triangle-Astérides

 
24 juillet - 31 août
Friche La Belle de Mai
41 rue jobin

Pour ce solo show, Aline Bouvy convie les marqueurs des premiers parcs d'attractions aux USA. De là se déploie une reflexion sur la blanchité et le rôle de l'imaginaire colonial dans l'amusement.

Une haute grille ourlée comme une lèvre, ornée d’un œil et de larmes, barre l’espace d’exposition dès son entrée. D’un côté : des costumes pendent du plafond, esquissant une faune sous-marine spectrale. De l’autre, pour qui pourra entrer : une sculpture monumentale — mi-visage grimaçant, mi-jambes entrouvertes d’où s’échappent d’étranges cris — et une cabine de verre sans tain se font face, au milieu d’un parcours auquel incitent, au sol, de larges jetons. Des murs aux œuvres, tout est blanc. « D’un blanc presque trop blanc », pour reprendre les mots de l’artiste Aline Bouvy. Si l’exposition dessine un paysage théâtral, semblant inviter le spectateur ou la spectatrice à jouer un rôle actif dans une inquiétante pièce immersive dont il·elle ne maîtriserait pas totalement les termes, ce n’est pourtant pas de l’espace scénique que se joue Aline Bouvy mais de celui, tout aussi codifié, des parcs d’attraction et parcs à thèmes. En France ceux-ci font irruption dans les années 1980, mais sont les héritiers des traditionnelles fêtes foraines ainsi que des expositions universelles et coloniales (dont deux ont eu lieu à Marseille, en 1906 et 1922) nées du XIXe siècle. L’espace d’exposition du Panorama, inauguré pour Marseille Capitale européenne de la culture en 2013, en est un lointain parent : « son immense baie vitrée fonctionne comme un panoptique, le point de vue surélevé sur la ville confère un sentiment de grandeur et de puissance comme dans une tour de contrôle dans laquelle on devient l’observateur·rice distancié·e d’un monde devant soi. »

Le titre de l’exposition, Le prix du ticket, joue sur le double sens du mot prix : il s’agit tout à la fois de ce dont le public doit matériellement s’acquitter pour entrer dans un parc d’attraction, pour en franchir les grilles ; mais aussi sur un plan symbolique de ce qu’il en coûte, de ce que l’on doit sacrifier. Car la monochromie des œuvres invite elle aussi à un glissement de sens : de la blancheur à la blanchité, impliquant dans un cas comme dans l’autre une prétendue neutralité, un certain ordonnancement du monde — une cruelle fiction blanche. Ce solo show de l'artiste Aline Bouvy, est pensé par trois curateur·ices (Victorine Grataloup, Marie de Gaulejac) et réalisé en partenariat avec le centre d'art la Ferme du Buisson.