France inconnue #3

-édito- En octobre 1983 sort le numéro 229 de L’Architecture d’Aujourd’hui intitulé France Inconnue 1 et le mois suivant un second intitulé France Inconnue 2. Avec ces deux numéros, Patrice Goulet poursuit et explicite un projet critique qui infuse la revue depuis qu’il en est rédacteur en chef. Il s’attache à valoriser les travaux d’architectes loin de Paris, des mécaniques de concours publics et l’attention des prescripteurs. Ce faisant, il donne à voir une nouvelle génération d’architectes qui œuvrent à l’abri des regards. Accompagné du photographe Gilles Ehrmann, il sillonne le territoire à la recherche de cet inconnu. La critique prend la forme d’une enquête de terrain. Pour le numéro 185 de Plan Libre, nous nous sommes rappelé.es cette aventure éditoriale. France Inconnue 3 est, à la manière des suites de séries B, un opus tardif et une version économique de ses prédécesseurs. Comme toutes les suites de suites, ce numéro 3 prend l’original comme prétexte pour l’oublier en cours de route. Nous avons alors demandé aux architectes contributeur.rices de la revue de rendre compte, sous la forme d’une critique, d’une architecture inconnue construite en France métropolitaine, chacun.e devenant les émissaires de son territoire et réalisant pour nous un tour de France par procuration. Les quatre décennies passées ont suffisamment changé les circuits de reconnaissance de l’architecture et des architectes pour que ce France Inconnue 3 ne puisse ressembler aux précédents. La presse spécialisée et la critique ont perdu leur valeur prescriptive, la culture architecturale s’est étoilée, ramifiée, popularisée. L’image est devenue le mode de circulation privilégié de la culture architecturale. Dès lors, qu’implique aujourd’hui d’écrire sur un bâtiment dans une revue indépendante ? Un texte pour des ami.es inconnu.es qui trouveront là une sorte de connivence. Dans leur ensemble, le choix des sujets nous renseigne sur les préoccupations qui animent l’architecture d’aujourd’hui. Les constructions sont pour la plupart vernaculaires et anonymes, elles portent en elles une échelle plus large, celle du territoire qui les produit. Les architectes, lorsqu’iels existent, s’effacent au profit des bâtiments et parfois de leurs occupant.es. Dix contributions ne sauraient être exemplaires d’une pensée partagée. Au contraire, elles s’attachent à raconter ce que peut être l’architecture à un endroit donné.

Tiré à part — Nous avons souhaité avec ce numéro inaugurer une série consacrée à la présentation de travaux d’enquête et d’observation de portions du monde. Un léger décalage à la jointure des mondes restitue le travail d’exploration et de narration du territoire entre Cerbère, Portbou et Colera par les architectes et artistes Odysseas Yiannikouris et Alessandra Monarcha accompagnés de la photographe Claire Lavabre lors de leur résidence à la Galeria Horizon. Ce tiré à part est un fragment réalisé dans le cadre du dispositif des Résidences d’architectes en France 2020, porté par le Réseau des maisons de l’architecture avec le Mécénat de la Caisse des Dépôts, le Conseil National de l’Ordre des Architectes et le Ministère de la Culture. D’autres fragments restent à découvrir, ici et là, dans nos pensées et sur le territoire

 

Lavanha par Ophélie Dozat • Le rocher de l’être suprême par Galaad Van Daele • La salle de bain d’Ingrid Caven par Benjamin Lafore • L’architecture sensible de Cantercel par Joanne Pouzenc • Je suis une anse par Guillaume Aubry • Les chalets de Gruissan par Peaks – Charles Aubertin, Camille Dupont, Éva Maloisel • Super marché par Sébastien Martinez-Barat • La forge de Méréville par UR • Les inconnues éblouies par Julien Lafontaine Carboni et Paule Perron • France inconnue, mais de qui ? par Jean-Baptiste Friot