Loin de la Terre

-édito- De numéro en numéro, la revue explore ce que nous pourrions appeler les confins de l’architecture. Des territoires limites, où l’architecture résiste et s’amalgame, parfois s’estompe au contact de réalités singulières, d’autres disciplines et d’autres métiers. C’est là où le rôle des architectes se réinvente qu’apparaissent des architectures étranges. En reconsidérant les 20 derniers numéros publiés, on décèle cette attention aux marges de l’architecture, ces zones où elle s’épuise et se questionne, comme ligne directrice de la revue.

En sollicitant celles et ceux qui pensent et préparent la conquête de l’espace, nous regardons l’architecture extraterrestre comme une de ces zones critiques. Les contributions rassemblées ici évoquent toutes un sentiment double de doute et d’enthousiasme. La prospection scientifique et l’esprit pionnier ne laissent jamais oublier la quantité de ressources ainsi que les enjeux éthiques et politiques inhérents à la promesse de « quitter la Terre ». L’architecture est doublement questionnée par l’observation et l’exploration spatiale. L’observation spatiale exacerbe la capacité à décrire, mesurer, représenter des portions de réel inconnu. Le travail de Rosetta autour et sur la comète Tchouri témoigne de cette grande aventure topographique. L’exploration, la conception de vaisseaux et d’habitats spatiaux, laisse entrevoir l’imaginaire d’une architecture techno-primitive qui oscille entre deux archétypes, le navire et la caverne. L’habitat lunaire le plus crédible à ce jour est une grotte de roche lunaire. L’hostilité de l’environnement extraterrestre, l’absence d’eau, d’air et les matériaux de construction presque inexistants, les quantités d’énergies nécessaires pour s’affranchir de la pesanteur et de manière plus pernicieuse pour stocker des données d’observation sont autant de faits qui pour reprendre les mots de Buzz Aldrin découvrant le paysage lunaire augurent d’une « magnifique désolation » ★

Sébastien Martinez-Barat

Traces par Caroline Corbasson • L’ISS. Habiter, travailler, explorer à 400km de la Terre par Sébastien Barde • Node 1 : nouveau paradigme pour le big data dans l’espace par Joana Vilaça et Thanat Prathnadi • Habiter sur la lune par Serge Chevrel